SFjRO Veille bibliographique N°21 - Avril 2016

Voici la vingt-et-unième édition de notre veille bibliographique!

Dans cette édition, vous retrouverez les résumés suivants :

- Cancers de la cavité buccale chez les sujets jeunes : résultats thérapeutiques et analyse de facteurs pronostiques, soumis par Amina Bouamama de Poitiers,

- Toxicité cutanée aigue d’une radiotherapie mammaire à hypofractionnement sévère délivrée sur une semaine versus une radiotherapie à hypofractionnement modérée délivrée sur 3 semaines : Résultats de l’essai UK FAST forward, soumis par Paul Lesueur de Caen,

- Détection de la récidive locale après radiothérapie stéréotaxique pulmonaire : la radiomic fait elle mieux que l’expérience du clinicien ? soumis par Waisse Waissi de Strasbourg

- Radiothérapie stéréotaxique pour les cancers de prostate de faible risque et de risque intermédiaire, soumis par Thomas Leroy de Lille,

-Radiothérapie de rattrapage par IGRT ou stéréotaxie pour les récidives locales de cancer de prostate, soumis par Guillaume Janoray de Tours

Tous les membres de la SFjRO sont invités à participer à cette veille. Vous pouvez proposer vos résumés à l'adresse contact@sfjro.fr. Pour que votre travail soit accepté, il doit être rédigé en respectant la charte éditée par la SFjRO qui se trouve à cette adresse.

Bonne lecture!

Alexandre

ORL

Cancers de la cavité buccale chez les sujets jeunes : résultats thérapeutiques et analyse de facteurs pronostiques

Cancer/radiother, Avril 2016

P. Blanchard, C. El Khoury, S. Temam et al.

Auteur du résumé : Amina Bouamama

Contexte : Devant une augmentation de l’incidence des carcinomes épidermoïdes de la cavité buccale (site tumoral prédominant : langue mobile) chez le sujet jeune, notamment les jeunes femmes dépourvues d’intoxication éthylotabagique et les données contradictoires concernant le pronostic comparant les sujets jeunes et âgés (pronostic comparable vs défavorable chez le sujet jeune) ont amené à analyser la prise en charge et les facteurs pronostiques pour la survie et le contrôle tumoral.

Méthodes : Etude rétrospective de 1999 à 2011 à l’institut Gustave Roussy, chez des patients âgés de moins de 40 ans et pris en charge pour un carcinome épidermoide de la cavité orale. 63 patients ont été inclus. Les caractéristiques des patients, des tumeurs, du traitement et le devenir ont été enregistrés. Les facteurs pronostiques de la survie globale et la survie sans progression ont été analysé par la méthode de Kaplan-Meier, analyse unifactorielle et multifactorielle.

Résultats : Le suivi médian était de 64 mois. La majorité des tumeurs siégeait au niveau de la langue mobile (n =54, 86 %). Au total 17 patients sont décédés, dont 15 du cancer traité. Les taux de survie globale et sans progression à 5ans étaient de 80 % et 69 %. Les taux de survie sans rechute locale, régionale ou métastatique à 5ans étaient de 80 %, 91 % et 89 %. En analyse multifactorielle, seule l’absence de chirurgie initiale était pronostique pour la survie globale (hazard ratio [HR] : 13,5 [2,0 ; 90,5], p =0,007), tandis que la consommation d’alcool (HR : 0,38 [0,15 ; 0,9], p =0,03) et l’absence de chirurgie (HR : 9,8 [1,9 ; 50,9], p =0,006) étaient associées à une diminution de la probabilité de survie sans progression. Un âge plus jeune (moins de 30ans) n’était pas associé ni à la survie globale ni à celle sans progression.

Implication pour la pratique clinique / limites : Les taux de survie et de contrôle tumoral sont relativement élevés chez les sujets jeunes atteints. L’identification préthérapeutique des sujets à risque de récidive est actuellement difficile. La balance entre risque de rechute et toxicité des traitements justifie la réalisation d’études supplémentaires, sur le plan clinique et pour le développement de biomarqueurs pronostiques.

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SEIN

Acute skin toxicity associated with a 1-week schedule of whole breast radiotherapy compared with a standard 3-week regimen delivered in the UK FAST-Forward Trial.

Toxicité cutanée aigue d’une radiotherapie mammaire à hypofractionnement sévère délivrée sur une semaine versus une radiotherapie à hypofractionnement modérée délivrée sur 3 semaines : Résultats de l’essai UK FAST forward.

Radiother Oncol, Avril 2016

Brunt AM, Wheatley D, Yarnold J, et al

Auteur du résumé : Paul Lesueur

Contexte : L’étude UK FAST forward évalue l’efficacité d’une radiothérapie mammaire à hypofractionnement sévère versus une radiothérapie à hypo fractionnement modérée. En dehors du contrôle local, les toxicités aigues et tardives sont des données déterminantes pour l’application ou non en routine d’un tel schéma thérapeutique. Deux sous études menées successivement et évaluant la toxicité aigues sont présentées ici.

Méthodes : Une étude de phase III multicentrique a été menée entre novembre 2011 et février 2014, randomisant les patients dans trois bras de traitement : 40Gy/15fr/ 3semaines, 27Gy/5 séances/ 1 semaine, et 26Gy/5seances/ 1 semaine. Un boost du lit tumoral de 10 ou 16Gy en 5 à 8 fractions pouvait être realisé si cela était nécessaire. Les traitements étaient réalisés en radiothérapie conformationnelle 3D par deux faisceaux opposés tangentiels. Les patientes ayant une indication de radiothérapie des aires ganglionnaires étaient exclues.. Les patientes étaient surveillées de manière hebdomadaire durant le traitement puis pendant les 4 semaines suivantes. Une cotation RTOG était utilisée dans la première analyse, tandis que échelle CTCAE était préférée dans la seconde analyse. L’objectif principal de ces sous études était le taux de radiodermite de grade III.

Résultats : Respectivement 190 et 162 patientes ont été incluses dans ces deux sous études. Les taux de radiodermite de grade III selon le RTOG dans la première étude sont respectivement de 13,6%, 9,8%, 5,8% dans les bras 40Gy, 27Gy et 26Gy. Dans la seconde étude ces taux de radiodermite de grade III selon la CTCAE chute à 0%, 1% et 2%.

Implication pour la pratique clinique / limites : Cette étude confirme le faible taux de toxicité aigüe lors de l’utilisation de schéma radiothérapiques mammaires à hypo fractionnement sévère et ce quelque soit la chirurgie qui ait précédé. Ce résultat était attendu, la toxicité aigüe étant surtout corrélé à la dose totale et moins au fractionnement. L’échelle CTCAE qui ne tient pas compte de l’œdème aigue radio induit est plus adaptée que l’échelle du RTOG pour l’évaluation de ces protocoles à hypo fractionnement sévère. L’absence de prise en compte de l’œdème dans la CTACE explique la différence de taux de radiodermite de grade III en fonction des deux sous études. Les données de toxicité tardives seront beaucoup plus décisives et intéressantes à interpréter. Les britanniques, dans une conjoncture medico économique toujours plus sensible, poursuivent leur quête vers l’hypo fractionnement maximal. Ces schémas thérapeutiques ciblent une population beaucoup plus vaste que les schémas d’irradiation partielle accélérée actuellement développées, mais presentent un risque de toxicité tardive plus important du fait du volume irradié .

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POUMON

Detection of local cancer recurrence after stereotactic ablative radiotherapy (SABR) for lung cancer: physician performance versus radiomic assessment

Détection de la récidive locale après radiothérapie stéréotaxique pulmonaire : la radiomic fait elle mieux que l’expérience du clinicien ?

IJROBP, Avril 2016

Mattonen SA, Palma DA, Johnson C, et al

Auteur du résumé : Waisse Waissi

Contexte : Actuellement, la radiothérapie stéréotaxique pulmonaire est une alternative dans le traitement à visée curative des tumeurs pulmonaires inopérables. Les modifications scanographiques après radiothérapie stéréotaxique sont fréquentes et peuvent masquer une rechute locale. Cependant, la détection précoce de la récidive locale permettrait un traitement chirurgicale ou radiologique interventionnelle pour des patients sélectionnés. Plusieurs études ont mis en évidence des critères scanographiques permettant de différencier la rechute locale de la fibrose pulmonaire mais la variabilité-inter-observateur reste importante. Actuellement, la radiomic est un vaste sujet de recherche dont le but est d’extraire des informations quantitatives et qualitatives complexes à partir des examens d’imagerie. Cette étude a pour objectif d’évaluer les performances diagnostiques des médecins (radiothérapeutes, radiologues) et de les comparer à un outil informatique basé sur une signature radiomic.

Méthodes : Quinze patients avec une récidive locale (dont 7 avec une biopsie) ont été comparés à 30 patients (ratio 1:2) sans récidives locales, présentant des caractéristiques initiales communes (taille du PTV, localisation, fractionnement). Les patients ont été suivis par un TDM à 3, 6 et 12 mois puis tous les 6 à 12 mois. Les images ont été analysées par 3 radiothérapeutes et 3 radiologues afin d’évaluer la récidive ou la fibrose et leur niveau de certitude quant au dignostic. Cette évaluation a été comparée avec une signature radiomic.

Résultats :182 TDM post-traitement ont été analysé par les médecins avec une sensibilité de 83% (67-100%) et une spécificité plus faible de 75% (67-87%) avec une variabilité inter-observateur modérée (kappa=0,54). La détection par les médecins apparaissait en moyenne à 15,5 mois. Avant 6 mois, le taux de faux négatif pour les médecins était de 99% alors qu’il diminuait à 23% lorsque l’évaluation était faite à partir des critères de textures de la signature radiomic.

Implication pour la pratique clinique / limites : : La surveillance après irradiation en conditions stéréotaxiques pulmonaire doit permettre de différencier une récidive locale des séquelles pulmonaires radio-induites et ainsi détecter précocement une rechute éventuelle potentiellement curable (radiofréquence, chirurgie). La détection des récidives est essentiellement basée sur l’expérience du clinicien mais cette détection se fait souvent tardivement (médiane : 15,5 mois). Avant 6 mois, les modification n’était jusqu’à lors pas interprétable et nécessitait le plus souvent des examens de contrôle tel que d’autre TDM ou des TEP. Cette étude montre que l’évaluation des récidives peut se faire plus précocement à partir d’une signature radiomic dont le but est d’extraire des données numériques à partir des examens d’imagerie et d’obtenir des informations prédictives de rechute. Cependant, cette étude présente des limitations. D’une part, seulement 7 patients ont eu une biopsie pour l’évaluation de la récidive alors que le diagnostic positif a été retenu sur des critères d’imagerie pour les autres patients. D’autre part cette signature ne prend en compte que des critères scanographiques sans prendre en compte les critères métaboliques (TEP). Enfin, une des limitations méthodologiques concerne le fait que un certain nombre de patients sont commun à la cohort de test et la cohorte de validation. Malgré l’ensemble de ces limitations, il s’agit de la première étude montrant l’intérêt d’une signature radiomic pour détecter la récidive après radiothérapie stéréotaxique pulmonaire, permettant ainsi un prise en chirurgicale précoce lorsque cela est possible.

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PROSTATE

Stereotactic body radiation therapy for low and intermediate risk prostate cancer Results from a multi-institutional clinical trial

Radiothérapie stéréotaxique pour les cancers de prostate de faible risque et de risque intermédiaire

European Journal of Cancer, Mars 2016

Raquibul Hannan et al

Auteur du résumé : Thomas Leroy

Contexte : La radiothérapie stéréotaxique permet d’utiliser de hautes doses par fractin ce qui peut présenter un avantage majeur dans le cancer de prostate. Plusieurs séries ont été rapporté en utilisant des doses de l’ordre de 35 Gy en 5 fractions. Cet essai de phase I/II est le premier à explorer une augmentation de dose par SBRT dans le cancer de la prostate. L’objectif était donc de rapporter l’efficacité et la tolérance de cette augmentation de dose.

Méthodes : Il s’agit d’une étude de phase I/II multicentrique.Les patients incluables devaient soit être de faible risque ou de risque intermédiaire selon la classification de D’amico. Si le score de Gleason était égal à 7 le PSA devait être inférieur à 15. Dans l’essai de phase I, les patients par cohorte de 15 étaient traités en 5 fraction à des doses totales de 45, 47,5 ou 50 Gy. Pour la phase II, la dose de 50 Gy ayant été correctement tolérée, 47 patients supplémentaires ont été inclus et traités à cette dose.

Résultats : 91 patients ont été inclus dans l’analyse : 63,7% avaient un cancer de prostate de risque intermédiaire et 36,3% un cancer de bas risque. Après un suivi médian de 54 mois, le taux de contrôle biochimique était de 100% à 3 ans et de 98,6% à 5 ans. Aucun patient n’a développé de métastases durant le suivi. La survie globale était de 94% à 3 ans et de 89,7% à 5 ans sans décès attribuables au cancer de prostate. Il est survenu respectivement 0% et 5,5% de toxicités urinaire aigues et tardives de grade ≥3 et 2% et 7% de toxicités aigues et tardives digestives. On note 4 toxicités de grade 4 (3 digestives, 1 urinaire)

Implication pour la pratique : ECette série retrouve un taux de contrôle biochimique à 5 ans plus haut que ceux décrit avec la chirurgie, la radiothérapie externe ou la curiethérapie. La seule récidive a eu lieu chez un patient traité à 45 Gy. Bien qu’il faille faire attention aux toxicités tardives notamment à la dose de 50 Gy. Cette étude est encourageante pour l’avenir de la stéréotaxie dans le cancer de prostate

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PROSTATE

Salvage image-guided intensity modulated or stereotactic body reirradiation of local recurrence of prostate cancer

Radiothérapie de rattrapage par IGRT ou stéréotaxie pour les récidives locales de cancer de prostate

British Journal of Radiology, Août 2015

Zerini D, Jereczek-Fossa BA, Fodor C, et al

Auteur du résumé : Guillaume Janoray

Contexte : évaluer rétrospectivement la ré-irradiation externe de la prostate ou du lit prostatique pour des récidives locales, après radiothérapie exclusive ou adjuvante/de rattrapage.

Matériel et méthodes : 32 patients ont été traité entre Février 2008 et Octobre 2013. Tous les patients avaient une rechute locale clinique/radiologique dans la prostate ou le lit prostatique sans métastases à distance. La ré-irradiation a été réalisée selon des techniques spéciales de radiothérapie (radiothérapie stéréotaxique y compris par CyberKnife ; IMRT avec IGRT etc.). La toxicité a été évaluée en utilisant les échelles du RTOG/EORTC. Le contrôle biologique a été évalué selon les critères de Phoenix (NADIR + 2ng/ml).

Résultats : Ltoxicité urinaire aiguë: G0, 24 patients; G1, 6 patients; G2, 2 patients. Toxicité rectale aiguë: G0, 28 patients; G1, 2 patients; et G2, 1 patient. Toxicité tardive urinaire (évaluée dans 30 cas): G0, 23 patients; G1, 6 patients; G2, 1 patient. Toxicité rénale tardive: G0, 25 patients; G1, 5 patients. Après un suivi moyen de 21,3 mois, 13 patients étaient en réponse complète, 3 étaient en vie avec une rechute biochimique et 12 patients étaient en vie avec une rechute clinique évidente. Quatre patients étaient décédés : deux suite à une progression de la maladie et deux d'autres causes.

Implication pour la pratique : la ré-irradiation de cancer de prostate utilisant des techniques modernes est une approche possible pour les récidives locales de cancer de la prostate permettant un contrôle tumoral de 2 ans chez environ la moitié des patients. La toxicité des était faible. Des études futures sont nécessaires pour identifier les patients qui bénéficieraient le plus de ce traitement.

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La veille bibliographique de la SFjRO est rendue possible par le soutien des laboratoires Janssen
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